Posté 12 avril 2018 par dans la catégorie Dossiers
 
 

Le Marvel Cinematic Universe et moi. L’avis de Ginlange

 

En 2008, sur des fauteuils rouges et les têtes relevées, Iron Man arrivait enfin sur le grand écran. Le grand public faisait alors la connaissance d’un « héros » égocentrique, vendeur d’armes et dragueur invétéré (qui d’ailleurs aurait bien du mal à s’imposer aujourd’hui comme cet antihéros cool qu’il était il y a dix ans). Les lecteurs de comics exultaient de découvrir Tony en chair et en os (par un acteur voulant faire oublier un passé… trouble). A la fin d’un divertissement gentillet et quelque peu prévisible, une discrète scène arriva après le générique. Le MCU était en route !

Samuel L. Jackson en Nick Fury, modèle avoué de la modernisation du personnage pour les Ultimates de Mark Millar, annonçant à Tony que le monde est bien plus vaste qu’il ne l’imagine.L’initiative Avengers est en marche. Ce qui n’était à ce moment là qu’un clin d’œil amusant de Marvel destiné aux aficionados déclencha l’impatience de millions de spectateurs permettant au studio de se rendre compte du potentiel de la franchise qu’il avait entre les mains. Elle devint alors la première scène post-générique du Marvel Cinematic Universe, une saga à l’ambition hors norme de faire des films comme des épisodes de séries, d’un univers partagé où les héros se rejoignent, se séparent, et influencent une œuvre monde. Quatre ans et cinq films plus tard, Avengers sort en salle réunissant tous les héros présentés au fil des années et fut le film le plus rapide à atteindre la somme de 1 milliard de dollars au box office mondial. Un premier pas vers une réussite publique, qui aujourd’hui, en 2018, est toujours incontestable. Arrivé à la fin de la phase 3 et objet d’une promotion virale et intempestive d’Infinity War depuis des mois, sa sortie à la fin du mois s’annonce déjà comme l’une des plus importantes du studio depuis leur première réunion en 2012.

Au cœur des ténèbres

Le succès public du MCU est comme je le disais, incontestable. Il a permis à la planète entière de découvrir sur grand écran les héros iconiques de Marvel, aux super-héros de s’imposer comme une machine de guerre de l’Entertainment. Mais après dix-huit films, les failles de celui-ci se font de plus en plus nombreuses et, même si le succès est encore au rendez-vous (et pour encore un moment), il fait partie d’une mode condamnée à disparaître, pour mieux réapparaître quelques années plus tard. C’est le cercle de la vie, un cycle éternel. A moins que celui-ci n’arrive finalement à se renouveler, lui permettant de rester sur le devant de la scène pour donner des frissons à des millions d’enfants et faire frémir la fibre nostalgique de leurs parents. Un renouvellement que le studio entend réussir si on regarde ses dernières productions et analyse son planning pour les années à venir.

Pour ma part, mon histoire avec le MCU ressemble à une pente escarpée, une histoire d’amour contrariée ou un conflit avec quelques moments de répit. La phase 1 avec la présentation de ses personnages que je connaissais déjà m’a laissé au mieux indifférent, au pire profondément ennuyé. Il faut dire que ces films ne brillaient pas par leurs qualités cinématographiques. Un schéma se répétant déjà inlassablement. Néanmoins, je me permets de souligner deux choses : l’arrivée de Scarlett Johansson dans Iron Man 2, film bas du front s’assumant totalement où ma passion pour cette actrice pris son envol, j’avoue. Et l’œuvre finale de cette première phase, Avengers. En 2012, le résultat de quatre ans d’attente, l’aboutissement d’un univers partagé très attendu sonnait véritablement comme une nouveauté assez jouissive, un plaisir coupable très bien exécuté par un Joss Whedon alors acclamé. Aujourd’hui celui-ci est plutôt au fond du trou, en train de remettre la crème dans le panier.

La phase 2 fut marquée par Iron Man 3 et surtout Les Gardiens de la Galaxie. Réellement surpris, comme beaucoup, par la réussite d’une telle entreprise, des personnages totalement fous et inconnus du grand public prenant vie dans un space opera décomplexé. Malheureusement après ce surprenant coup d’éclat, arriva L’ère d’Ultron. J’avoue n’en avoir presqu’aucun souvenir, je me souviens vaguement d’un ralenti de l’équipe dans une forêt enneigée et d’une bouillie visuelle infâme avec un méchant robot. Après celui-ci, Marvel sombra pour moi définitivement dans la redite au fond aussi vide que sa forme, à l’exception peut être d’Ant-Man, honorable divertissement qui aurait pu être bien plus si Disney n’avait pas pris peur et viré Edgar Wright.

Change is coming ?

Mais en 2017 et début 2018, sortent sur les écrans les 3 meilleurs films du studio, Les Gardiens de la Galaxie 2, Thor Ragnarok et Black Panther :

Après l’incroyable succès du premier volet des Gardiens, le virevoltant James Gunn a carte blanche pour le deuxième du nom et va surprendre tout le monde avec un film d’une liberté totale. Totalement éloigné des considérations de l’univers partagé, une aventure sous acide se permettant de longues disgressions émotives, un rythme à part pour une vision très personnelle de chacun des personnages.

Ensuite, Thor Ragnarok brille par son second degré. Le réalisateur au nom surréaliste, Taika Waititi va à rebours des deux premiers volets, faisant de Thor un blondinet débile et de Loki un grand enfant à la jalousie maladive, celui-ci va déconstruire le mythe pour mieux en jouer. Malgré ses quelques défauts, la générosité et le véritable humour se dégageant de l’œuvre acheva de m’emporter.

Pour finir, comment ne pas évoquer Black Panther ? Œuvre politique et véritablement engagée, une œuvre personnelle d’un réalisateur comprenant le personnage et la complexité de son univers. L’ouverture au monde comme maître mot, les personnages passant avant l’action, Ryan Coogler, après Creed nous met une seconde fois au tapis par l’ambition qu’il déploie.

Si le Marvel Cinematic Universe est pour moi si fragile, c’est par son manque d’ambition et cette redondance qui le caractérise. Il s’envisage comme une série en plusieurs épisodes où chacun d’eux est connecté à l’autre. Cela a ses avantages, un univers qui se veut cohérent et passionnant à suivre mais il y a de plus grands inconvénients, comme le manque d’individualité de chacun d’eux. N’étant qu’une branche du même arbre, comment se détacher de celui-ci ? Etre une œuvre unique sans faire partie d’un tout ? C’est très difficile, encore plus quand la charte graphique et scénaristique est la même pour chaque film. Les mêmes couleurs, les mêmes plans, les mêmes affiches (Ah si, il y a de plus en plus de personnages dessus à chaque fois), les même trames scénaristiques (la palme de la redite pour Doctor Strange/Iron Man) et l’éternel spectacle pyrotechnique final allant de 20 à 30 minutes de combats et d’effets spéciaux. Même pour les œuvres les plus réussies du studio, (Black Panther, les Gardiens de la Galaxie 2) cette déferlante d’action est véritablement lassante.

Mais après tout, si cela marche, pourquoi changer la formule ? Je comprends leur raisonnement, mais il y a un moment où cela va coincer. En engageant que des yes men pour annihiler toute vision personnelle et se conformer au code du tout, chaque œuvre se ressemble et rien ne passionne. Les rares films sortant du lot étant ceux prenant le plus de risques, ceux confiés à un réalisateur avec une véritable vision. Mais comme je l’ai dit, il reste un espoir. James Gunn, avec le deuxième volet des Gardiens, a livré une œuvre personnelle sonnant profondément juste malgré ses défauts inhérents. De plus, Thor 3 ne se prenant pas au sérieux, s’envisageait pour ce qu’il est véritablement, un divertissement un peu idiot s’amusant de lui-même et de ses personnages. Et le dernier bébé, Black Panther, est quand à lui une œuvre plus réaliste, lorgnant sur la recette gagnante de la trilogie de Christopher Nolan plus que du spectacle perpétuel des Avengers. Et cela avec un vrai fond et une véritable forme.

En permettant à des réalisateurs de s’exprimer pleinement, en prenant conscience de ce qu’il est véritablement et se permettant alors d’innover, le MCU semble trouver ses marques, un ton et laisser de coté un sombre passé. Il ne faut alors qu’espérer que tout cela n’est pas qu’une passade et que les prochains films arrivant assez vite, confirment la mutation d’une saga en ayant grand besoin.

 


 
Ginlange est un peu comme Bruce Wayne, mais en mieux. Aimant cinéma et comics, et parfois les comics au cinéma, il essaiera de partager au mieux ses coups de cœur et coups de gueule avec vous, pour votre plus grand plaisir. Ave Lynch.