Stan Lee et moi : “Il écrivait mes comics”
Stan Lee m’a accueilli dans le monde des comics. Le premier comics qui m’ait appartenu, je veux dire le premier que j’ai non seulement lu mais aussi possédé était un Thor signé par Stan Lee et Jack Kirby. Thor le fils d’Odin numéro 4 intitulé Thor aux Enfers, collection Super-Star aux éditions Artima.
Cette histoire, je l’ai déjà raconté des dizaines de fois et dans le fond, elle n’est pas si intéressante que ça.
Pourtant, force est de constater que c’est l’audace, le gigantisme et l’esprit d’aventure qui régnaient dans les pages de cette BD qui ont fait de moi un lecteur de comics.
Ces pages m’ont vraiment marqué. Thor y affronte des monstres avec des flingues mais doit aussi sauver la belle Sif en compagnie de son pote Balder des mains d’un mec orange en slip : Lui.
J’ai alors 10 ou 11 ans, je suis mordu par le virus. Je n’ai pas encore lu le nom des artistes qui ont signé cette BD. Je ne découvrirai ces grands noms que quelques années plus tard.
Plus tard, les publications Lug ou Semic que j’achète et que je collectionne portent une mention faisant référence à Stan Lee. “Le magazine des super-héros de Stan Lee” ou un plus sobre “Stan Lee présente” sont omniprésents sur mes BD. Enfin, dans mon souvenir…
Pire, dans Strange Spécial Origines, on voyait une représentation de Stan sur sa machine à écrire, en train d’inventer les histoires de ces personnages.
Dans ma tête de gosse, je suis alors persuadé que Stan Lee est un mec barbu hyper sympa d’une quarantaine d’années qui écrit toutes les BD de super-héros que je trouve dans ces magazines.
Je vous rappelle juste qu’on est avant Internet et qu’on a pas vraiment de moyen d’avoir accès à une information de qualité sur Stan Lee. J’ai alors un dizaine d’années, j’imagine ce que je veux sur Stan et rien ne peut me faire douter.
Le meilleur personnage Marvel
Quand dans les années 60, il invente les personnages des Quatre Fantastiques, c’est une commande de son éditeur pour surfer sur une mode (re)naissante du comics de super-héros. Lui, il n’y croit alors pas vraiment. Il se laissera influencer par sa femme. C’est elle qui lui mettra le pied à l’étrier.
Les super-héros n’intéressent pas Stan Lee à ce moment là et, puisqu’il semble penser que c’est une mode temporaire, il décide de se lâcher complètement et invente cette idée de super-héros à problèmes.
Je ne sais pas si l’histoire est 100 % vraie.
C’est en tout cas ce que j’en ai compris. Désolé si mon rapport intime avec Stan Lee écorne quelque peu la vérité historique. Corrigez moi dans les commentaires si besoin. Merci.
Au bon endroit, au bon moment…
Il y avait vraiment un côté fascinant à imaginer Stan Lee écrivant toutes les aventures de tous ces personnages.
Enfant, j’étais persuadé que toutes les pages de mes comics sortaient de sa machine à écrire.
C’est aussi ça le génie de Stan. Il a toujours été doué pour la mise en scène. Il a joué avec son image comme il joue avec celle de ses super-héros. Avec ses éternelles lunettes de soleil, avec ses expressions comme True Believers ou Excelsior, il est devenu un personnage Marvel à part entière.
Aujourd’hui, l’aboutissement de cette démarche est cette succession de caméos au cinéma. Quel que soit le film, quel que soit le studio, les personnages Marvel se devaient de propose une séquence, même courte, mettant en scène celui que j’ai longtemps appelé “le gentil papy des comics“.
Stan Lee est alors un personnage de ces films. Comme ce fut le cas avec les comics de mon enfance, il est partout, omniprésent et incontournable. Je veux dire, il y a même des théories de fans sur son vrai rôle dans tout ça !
En bon fan, je l’avais déjà vu au cinéma notamment dans Mallrats de Kevin Smith où il interprète son propre rôle.
Faire feu de tous bois
D’ailleurs, on notera qu’il avait le chic pour repérer les modes et tenter de surfer dessus.
On apprend par exemple dans le livre Comix Book : quand Marvel publiait des comics underground que dans les années 1970, pour surfer sur la vague de ces productions alternatives, il lance sa propre gamme de Comix, supervisée par Denis Kitchen et publiée par Marvel Comics.
L’aventure a été de courte durée. Elle prouve juste que Stan, sentant une nouvelle mode arriver, a choisi de surfer sur la vague, aussi courte fût-elle, plutôt que de la laisser passer.
Cette façon de sentir les modes, c’est aussi ça la grande force de Stan Lee.
L’ami des enfants et le business man
Pourtant, tout n’est pas rose dans le parcours de Stan.
En grandissant, j’ai pu découvrir que la fameuse Marvel Way qui semblait être une fantastique opportunité pour lancer de grandes séries dans cette fameuse Maison des Idées ressemblait tout de même a une petite escroquerie, évidemment au détriment des artistes.
La grande histoire des comics se souvient des noms qui ont gagné leur procès contre les éditeurs, pas forcément de ceux des vrais créateurs. Tout comme ces héros, Stan avait donc ses zones d’ombre. Amusant pour un type qui aimait tant être dans la lumière.
D’une certaine façon, c’est l’archétype de l’escroc sympathique. Il a su cultiver cette image de gentil papy des comics pour dissimuler un businessman à l’américaine.
Il n’hésite pas à tirer la couverture à lui, utilisant les œuvres d’auteurs aussi doués en BD qu’incapables de faire parler d’eux. Je dois lui reconnaître un talent certain pour être toujours dans les bons coups. Il a su s’entourer d’artistes exceptionnels, leur laisser une totale liberté de création et enfin ajouter ses lignes de dialogues avant de parapher le tout avec son nom. Si je pense qu’il reste un dialoguiste assez génial, je ne peux m’empêcher de rappeler qu’il doit en partie son succès aux talents de nombreux artistes dont le grand public n’entendra jamais parler.
Les héros Marvel à qui il prête ses mots parlent au public, dans tous les sens du terme. Ils deviennent des super-héros du quotidien, ils ont les problèmes qui peuvent toucher les lecteurs et ils habitent dans des villes réelles. Les super-héros de Stan Lee sont intimement proches du public.
Ceux qui ont donc été les héros de notre enfance ne sont pas aussi lisses et héroïques qu’on a pu le croire.
Stan a donc construit sa propre légende sur le dos des artistes avec qui il travaillait et c’est au moins une déception aussi grande que celle de découvrir que ce n’est pas lui qui écrivait mon Strange 250.
L’après Marvel…
J’ai continué à suivre Stan Lee après Marvel. Lorsqu’il quitte l’opérationnel de la Maison des Idées, il propose sa propre version de la création des héros DC Comics. Dans Just Imagine… il met en scène sa propre version de Superman, Batman, Wonder Woman, Flash, Catwoman ou Green Lantern. A l’époque, je suis persuadé que le génie qui a inventé les héros Marvel débarque chez DC et que les titres seront épiques.
Ils ne l’étaient pas.
Stan a continué à jouer sur sa notoriété. Il réinvente donc les héros de DC Comics puis lance un peu à la va-vite des concepts de super-héros qui n’auront pas le succès de leur illustres aînés. Certains comme The Traveller ont connu la joie d’une traduction partielle en France. Je l’ai lu il y a quelques semaines. Le titre est très dispensable.
Stan Lee dans le monde réel
Depuis quelques années, avec la multiplication des blogs et des sites comics, l’info va plus vite et la moindre info sur Stan Lee devient un article. Ça tombe bien, ses tribulations personnelles sont dignes des meilleurs épisodes de ses BD.
Il y a quelques semaines, on apprenait l’existence d’un trafic d’échantillons de sang de ce bon vieux Stan.
Quel savant fou, quel super criminel était donc derrière tout ça ? Qui dealait des fioles de sang du vieux créateur ? Dans le but de réaliser quel clone ou quelle créature humanoïde ?
Stan, c’était donc pour moi le gentil papy des comics. Comme ton papy, comme mon papy, il n’était pas toujours héroïque, pas toujours très classe, mais je l’aimais bien quand même. Il a semblé régner sur les comics tel que je les ai connus et ce depuis près de 30 ans.
Pourtant, Stan Lee était un vieux monsieur de 95 ans.
Dernièrement, il avait très mal supporté la mort de sa femme. C’est donc un vieil homme veuf qui s’en va, sans traîner de longue maladie dégradante, au plus fort de sa gloire et pouvant se targuer d’avoir fait rêver des millions d’êtres humains.
Merci pour tout Stan.
Merci à tous les artistes, les créations et les héros que tu as fédéré sous ta bannière.
Notre sommaire :
Stan Lee et moi par Bomask : “Stan Lee, c’était The Man !” (Vidéo)
Stan Lee et moi par Matt : “Il écrivait mes Strange !”
Stan Lee et moi par Comics Grincheux : “Fut-il incontournable ou indispensable ?”
Stan Lee et moi par Prime Sinister
Stan Lee et moi par Chris : “Sa plus grand création…”
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