Posté 24 octobre 2017 par dans la catégorie Humeurs
 
 

Le renouvellement des équipes artistiques. L’avis de Comics Grincheux.

Le changement, c’est maintenant ! Cette célèbre phrase, honteusement sorti de son contexte par moi-même s’applique tellement bien à un univers en perpétuel mouvement comme celui du comics. En tous les cas, pour les comics sous licence comme chez Marvel, DC Comics et autres.

Ce qui compte ici, c’est de comprendre qu’il est important qu’une équipe artistique se renouvèle, sous peine de provoquer un ennui chez le lectorat et je pense que c’est ce qui est intéressant chez les Big Two. A mon avis, l’intérêt d’un comics sous licence, c’est de voir plusieurs approches se conjuguer pour former une mythologie. Parfois, ça pourra donner des choses contradictoires mais ça ne me semble gênant que si c’est vraiment mal exécuté.

Des auteurs différents et a forte personnalité qui se succèdent sur une licence offre au fur et à mesure de l’existence de celle-ci un éventail large d’idées. Grant Morrison, quand il reprend les X-Men permet à ces derniers de regagner de l’intérêt. Avec son travail narratif habituel, il va bien entendu reprendre l’histoire de ces héros afin de leur donner une seconde jeunesse et ça marche.

La problématique provient souvent d’artistes qui ne peuvent s’empêcher de continuer à écrire sur un personnage alors même que leur run est censé s’être arrêté et qui semble aller dans une logique de prise de contrôle. Le parfait exemple me semble être Scott Snyder. L’auteur s’évertue à écrire sur un Batman dont il a fait le tour dans les 51 numéros de la série. Pourtant, il récidive avec All-Star Batman, un récit what-the-fuck où le personnage jure comme un charretier, fait des galipettes dans les champs, a une tronçonneuse, etc. Bref, un ensemble de joyeusetés enlaidies par les dessins de ce bon John Romita Jr. J’ai suffisamment détaillé ma haine du bousin ici. Finalement, ce ne sont pas tellement ces idées qui forment le cœur du problème mais plutôt l’impression que Scott Snyder caricature sa propre écriture et ce qu’il a fait précédemment. Son Batman était un symbole d’espoir dans une Gotham City en proie au terrorisme. Ce thème l’a guidé pendant l’ensemble de ses numéros mais ne le guide plus depuis. Ne reste en creux que l’idée d’un Batman jusqu’au-boutiste et toujours plus solitaire. Le problème prend encore une autre ampleur dans Metal, l’event DC Comics qu’il orchestre avec Greg Capullo, son compère des New 52. Il injecte ses obsessions pour le folklore dans la continuité DC et propose une sorte de fan-fiction, comme s’il avait relu ses propres travaux et souhaitait montrer à quel point il est intelligent. Dans le cas de Scott Snyder, on est face au cas typique d’un artiste adulé par son éditeur qui le laisse partir en roue-libre, sans plus aucun contrôle.

De manière récurrente, j’ai l’impression que c’est souvent une question d’ego qui empêche un artiste de laisser un personnage. Mais ça devient de l’acharnement thérapeutique lorsque l’auteur fait ça avec sa propre création. Si on peut évidemment penser à Todd McFarlane avec Spawn qui, s’il laisse la place à d’autres auteurs se dépêche souvent de reprendre le contrôle de son personnage. Dès lors, il ne fait que se répéter inlassablement, se perdant depuis quelques années maintenant dans une répétition grandiloquente d’histoires plus ou moins inspirées. Ce n’est pas que la série soit devenu mauvaise, c’est simplement qu’elle est d’une irrégularité consternante. Spawn, c’est un peu le creator-owned qui tombe dans son propre piège avec un auteur qui persiste alors qu’il plus rien à raconter de neuf. Robert Kirkman et Walking Dead, c’est aussi ça, l’auteur est un maître dans l’art d’écrire ses personnages mais les situations semblent se répéter de plus en plus. Jusqu’à quand l’esbrouffe tiendra-t-elle ? C’est bien là toute la question !

D’un autre côté, le phénomène que j’évoque est tout à fait logique et il transparaît dans plein de pan de la création artistique, pas uniquement le comics. Il est évident que l’originalité ne dure qu’un temps et que la capacité à innover trouve toujours ses limites. Un auteur ne peut pas trouver de nouvelles idées ou de nouveaux angles d’attaques, il en revient alors à recycler sans cesse ses propres idées. Du coup, il me semble que le renouvellement est quelque chose d’important, ne serait-ce que pour trouver de nouvelles approches. Chaque auteur apportera sa touche, qu’elle soit portée sur la réflexion, sur le fun, etc.

La problématique des auteurs qui ne savent pas lâcher leurs créations peut aussi se produire chez Marvel. Particulièrement, Ultimate Spider-Man qui a vu, après le décès de Peter Parker, Miles Morales prendre le relais. Ce dernier est une création de Brian M. Bendis qui bosse sur lui depuis 2011 et n’a cessé de lui offrir des aventures. Néanmoins, passée l’excellente première série, la suite se dilue dans un ennui et un rythme poussif. Le personnage commence à suivre le même chemin que son mentor, se perdant dans un recyclage perpétuel d’idées répétées inlassablement. Brian M. Bendis continue dans cette optique avec le personnage de Jessica Jones, relancé l’année dernière dans une nouvelle série. L’auteur n’a plus rien à raconter sur elle et répète inlassablement tout ce qu’il a déjà dit. C’est dommage parce que le personnage a un sacré potentiel quand même…

Ensuite, pour continuer sur le Tisseur, cette fois à travers Peter Parker, depuis bientôt dix ans, le même auteur travaille, de façon plus ou moins régulière, sur le personnage. Même si c’est loin d’être une catastrophe intégrale, le personnage souffre de façon régulière du syndrome du surplace. C’est-à-dire que rien n’évolue jamais ou alors, chaque évolution est très vite annulée. Dan Slott est plein de bonnes idées mais sa tendance à ne pas les exploiter rend ses récits lourds. Spider-Verse ou Spider-Island en sont les exemples les plus criants. Le concept est bon. Mais dans les deux cas, la seule exploitation qui est en fait, c’est le bourrinage. Tout le monde bavarde inutilement avant de castagner les méchants et de réinitialiser les univers.

 

Bref, le phénomène est souvent le même et s’illustre finalement de tous les côtés. Le véritable avantage offert par le creator-owned est celui de pouvoir faire des pauses. C’est généralement profitable aux lecteurs ainsi qu’aux équipes créatives qui peuvent alors prendre le temps de poser les prochaines intrigues. Encore que toutes les équipes créatives n’en ressentent pas le besoin.

Comics Grincheux.


 
Comics Grinch râle beaucoup. Son origine vient de ses nombreuses grincheries envers BvS. Ayant gonflé sa petite amie avec ça, elle lui suggéra d'en parler avec d'autres. Ce fût chose faite. Vénère Grant Morrison, conchie Mark Millar.