Big Black stand at Attica
Point(s) fort(s) :
Un récit qui nous interroge face au système carcéral.
Des moments mis en dessins de superbe façon.
Toujours le poing levé ! Big Black Stand at Attica est une proposition forte de la part de Panini Comics. Un geste audacieux à saluer pour un si gros éditeur. Ce comics très documenté nous raconte la mutinerie ayant eu lieu dans la prison d’Attica, en 1971 et le massacre qui a suivi. Un moment […]
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Editeur : Panini Comics
Toujours le poing levé !
Big Black Stand at Attica est une proposition forte de la part de Panini Comics. Un geste audacieux à saluer pour un si gros éditeur. Ce comics très documenté nous raconte la mutinerie ayant eu lieu dans la prison d’Attica, en 1971 et le massacre qui a suivi. Un moment important de l’histoire des droits civiques, peu mentionné. Aux crédits, on retrouve Big Black, un des protagonistes de la mutinerie, Jared Reinmuth et Améziane aux dessins.
De la lumière sur un fait obscur
Dans le récit qui se déroule, on suit donc Big Black qui s’est retrouvé dans cette prison et va subir, avec ses co-détenus les pires atrocités. Le comics nous épargne peu et montre la réalité d’un système carcéral brutal, renforcé par le racisme systémique et les préjugés. Le tout culminera dans un massacre excellemment dépeint. Les planches font mouches, avec d’excellentes idées de composition. Surtout, jamais nous ne sommes dans une forme de complaisance. On nous montre les morts, la brutalité de ces exécutions mais le tout n’est pas gratuit et n’en fait pas trop. C’est sobre comme le doit d’être la représentation d’un tel moment.
Au-delà de ça, le comics opère sur une structure classique. Big Black et Jared Reinmuth opère un début un peu chaotique avec pas mal d’allers-retours entre Big Black racontant le déroulé des faits à son avocat, son passé, ses débuts en prison, etc. Ce n’est pas toujours très fluide mais le récit se pose au bout de quelques pages avant de nous plonger réellement dans l’enfer d’Attica. Le restant se rapprochant surtout d’un documentaire, au plus près des faits, multipliant les points de vue, afin de montrer la parole raciste tenue par les politiques et responsables mais aussi par une partie de la population, demandant une exécution sommaire de ces prisonniers « qui l’ont bien mérité ». Là encore, les dessins d’Améziane rendent parfaitement cet aspect documentaire. Les personnages sont mis au centre de toutes les compositions, rappelant leur humanité mais aussi la dignité de ces victimes.
Face à nous-mêmes
Et c’est un autre des éléments forts du récit. Au-delà de nous mettre face à la réalité de cette violence inouïe, Big Black stand at Attica nous met aussi face à nos propre préjugés. La facilité avec laquelle nous jugeons les prisonniers, sans même les connaître. La facilité aussi avec laquelle les politiques parviennent à nous convaincre que ces individus méritent leur sort. Car les conditions de détention ne sont malheureusement pas au beau fixe en France, malgré ce que l’on pourrait croire. Dès lors, le récit se transforme rapidement en plaidoyer demandant une révision du système carcéral.
Mais bien entendu, puisque la prison d’Attica détenait de nombreux membres de la communauté afro-américaine, le récit met en évidence l’ensemble des biais racistes qui ont conduit aux mauvais traitements. Ici, pas de petites phrases connotées mais des injures violentes et crues qui démontrent encore une fois que le récit veut nous immerger totalement mais en se basant sur des faits tangibles, rapportés par Big Black. Et ce racisme systémique ne se limite pas à la prison, comme le manifeste la fin.
Également, le comics est aussi une démonstration du pouvoir de la fiction. Je l’écrivais récemment dans la newsletter exclusive à nos soutiens Tipeee, la fiction (ici, largement documentée et adaptée de la vie réelle) permet de mettre en lumière une réalité historique camouflée. Par là, le récit grave dans notre esprit ce moment historique. Pas sûr que beaucoup de choses aient changé depuis lors mais il semble nécessaire d’avoir ces évènements en tête pour en tirer des leçons afin de ne pas reproduire des erreurs. Big Black stand at Attica est un rappel fort, qui frappe dur et juste.
Bref, avec Big Black stand at Attica, Panini Comics édite un titre que l’on aurait pas vu chez lui. Un geste éditorial fort, à mon sens, d’autant que le récit nous plonge dans une insurrection violente et brutale manifestant toutes les problématiques du système carcéral, décuplées quand elles se confrontent au racisme systémique.
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