Ody-C Omnibus
Point(s) fort(s) :
La richesse des thématiques
Les dessins hallucinés et hallucinants
Point(s) faible(s) :
Le travail éditorial de Glénat Comics
Ody-C est une lecture exigeante et aussi éreintante. Sa narration particulière, ses thèmes, son idée de départ, ses dessins, tout pourra provoquer un blocage chez certains lecteurs. Mais pour ceux et celles que la manipulation de la narration et les planches complètement hallucinées ravissent, il y a de quoi trouver son bonheur.
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Editeur : Glénat Comics
Odyssée psyché du cerveau
L’avis de Comics Grincheux :
Ody-C est certainement une des expériences de lecture les plus déroutantes que j’ai eu. Je savais que Matt Fraction entreprenait de raconter l’histoire de l’Odyssée d’Homère en modifiant le genre de tous les personnages. Mais je ne savais pas que l’auteur entreprenait une œuvre à la narration unique.
En effet, ce qui va surprendre dès le départ, c’est cette narration imitant des vers, comme dans l’œuvre originale. Homère construisit son Odyssée avec des vers de seize syllabes, maximum. Matt Fraction entreprend de l’imiter en proposant des vers entre huit et seize cases. Chacun est numéroté et cela donne une tonalité très particulière à l’œuvre dès le départ. Tel un chant relatant des exploits farouches, le récit se construit de cette façon pendant dix chapitres, avant de basculer dans les deux derniers. Cette forme en vers se juxtapose à des séquences où ce sont les Dieux/Déesses qui s’expriment sous des bulles de dialogues classiques.
De cette simple originalité, Matt Fraction construit déjà un récit unique en son genre. Ajoutons à cela qu’il raconte en fait trois arcs distincts prenant chacun pour héroïne l’une des figures majeures de la prise de Troiia. Mais le premier problème, c’est qu’arrivé à la fin des douze numéros, rien n’est conclu. En faisant une recherche rapide sur internet, j’ai compris que la série était en pause depuis septembre 2016 mais qu’il restait encore douze épisodes à sortir. Dommage parce que j’aimerais vraiment savoir où ces trois femmes aboutiront dans leurs odyssées respectives. Chacun des trois arcs montrant des personnages aux caractères différents, affrontant des ennemis particuliers, reflets des angoisses des soldats et des femmes. Mais j’avoue volontiers n’avoir rien compris au troisième arc.
L’autre originalité vient évidemment de la modification du genre des personnages qui n’est pas sans incidence sur les thématiques abordées puisque l’on assiste à une œuvre plus féministe et qui, surtout, interroge sur le genre. Est-il important qu’un personnage soit une femme ou un homme ? Peut-on changer le genre et les thèmes originaux d’une œuvre sans la dénaturer ?
Chacun se fera son opinion personnelle mais pour l’auteur, c’est clairement non et oui et il entend dérouler cette analyse tout au long du récit en l’entrecoupant de nombreuses autres réflexions, toutes liées au genre et à la sexualité pris sous de nombreux angles. Le comics est foisonnant, riche, et bon nombre de personnes seront perdues dès le départ. Parce que la narration dont je parlais est tellement particulière qu’elle peut faire décrocher quasi-immédiatement si on ne parvient pas à rentrer dans le truc. Parce que si l’on n’est pas conscientisé sur les thématiques du genre, du féminisme, on risque de passer à côté des trois-quarts du message du comics. Parce que les planches de Christian Ward sont tellement psychédéliques qu’elles vont en perdre plus d’un.
Pourtant, il y a une forme de génie qui se dégage de cela. Les deux artistes respectent à la lettre les codes de la Tragédie grecque, en racontant l’histoire de femmes prisonnières d’un destin dont elles ne maîtrisent même pas les dialogues, où seules les divinités ont le droit à la parole. La narration donne ainsi une aura particulière au comics, quelque chose d’unique qui montre un Matt Fraction en pleine possession de ses moyens. Mais il ne faut pas oublier Christian Ward. Ses planches sont sublimes, adoptant parfaitement le ton de la série, il compense la tragédie par des couleurs totalement folles, donnant l’impression de regarder une SF rétro. Mais il y a aussi des idées rappelant Barry Godber et ses pochettes d’albums de King Crimson avec un travail anatomique déformant et complètement halluciné.
Oui mais voilà, c’est aussi quelque chose de forcément très hermétique si rien de tout cela ne nous intéresse et que l’on veut juste lire un comics pour se détendre. Ici, pas de détente, il faut être vigilant à chaque instant. L’autre problème que je noterai vient certainement de l’édition: j’aurais apprécié que Glénat Comics fasse un comparatif avec l’Odyssée pour ceux qui, comme moi, n’ont jamais lu l’œuvre d’Homère. Que ce soit à travers les personnages réutilisés et modifiés ou la façon dont Matt Fraction a tordu l’histoire.
Bref, Ody-C est une lecture exigeante et aussi éreintante. Sa narration particulière, ses thèmes, son idée de départ, ses dessins, tout pourra provoquer un blocage chez certains lecteurs et on ne pourra pas les blâmer. Mais pour ceux et celles que la manipulation de la narration, les planches complètement hallucinées ravissent, il y a de quoi trouver son bonheur dans cette lecture, même si elle est incomplète. Pourtant, sa rudesse et son hermétisme ne permet pas de recommander cette lecture.
La note de Comics Grincheux :
L’avis de Dram00n :
Comics Grincheux a déjà abordé la forme pour ce comics, donc je vais principalement revenir sur pourquoi cette lecture a été un calvaire pour moi. J’étais fortement intrigué par ce comics, étant plutôt adepte des récits de L’Iliade et L’Odyssée de Homère quand j’étais jeune. Étant un grand fan des récits portant sur la mythologie, la Grèce antique et les grandes aventures, Ody-C faisait forcément vibrer chez moi une corde sensible lors de son annonce et le nom de Matt Fraction sur la couverture attirait également mon regard.
Malgré tout, cette lecture a été poussive pour ma part. J’utilise le mot “calvaire” plus haut et je le pense sincèrement, je n’ai tout simplement pas pris de plaisir lors de ma lecture. Je ne pense pas que le titre soit mauvais, il ne m’est juste pas destiné. Dans sa construction, sa narration, ses dessins, rien ne me parle réellement dans ce comics. Je reconnais malgré tout le talent d’écriture de Matt Fraction et le travail remarquable de Christian Ward, mais le parti pris des auteurs n’est pas de mon goût.
Ody-C est destiné aux lecteurs prêts à vivre une aventure, une expérience lors de la lecture. Le lecteur qui arrivera à se plonger dedans vivra une expérience unique et marquante, je pense. Néanmoins, le titre ne parlera pas à tout le monde et pour celui qui n’arrivera pas à se plonger dedans, la lecture va paraître longue, très longue par moment. Cela ne remet pas en cause les talents des deux auteurs sur le titre, justement il faut mettre en avant le risque pris, d’autant plus aujourd’hui quand on voit le marché des comics actuel, pour ça je leur tire mon chapeau.
Je ne suis tout simplement pas le public visé pour Ody-C. Même s’il titillait mes goûts de jeunesse, le parti pris des auteurs est trop prononcé pour moi et le plaisir de la lecture n’a jamais été présent. Je pense malgré tout qu’il ne faut pas remettre en cause leur talent car le titre fera vivre une expérience marquante à certains lecteurs et ce sera une lecture qui leur restera en tête.
La note de Dram00n :
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